Le Temps a écrit :Germano Vailati, réduit au chômage technique en Valais, veut relancer sa carrière à Saint-Gall. Le 6 février, il croisera la route de
son ancien club et de Christian Constantin…
«La ville est jolie, les gens sont chaleureux, mon chien va bien s’adapter…» Germano Vailati sort de l’entraînement et, après les
mois de calvaire qu’il vient de traverser, cela suffit à son bonheur. L’ancien gardien du FC Sion, d’abord écarté au profit de
l’Egyptien Essam el-Hadary, casé ensuite au FC Metz, puis condamné au chômage technique par Christian Constantin, a fini par
trouver une issue: le FC Saint-Gall. S’il ne cache pas sa rancœur – «On a voulu me briser» –, le Tessinois préfère envisager l’avenir
sous le signe du bonheur. Il rattrape le temps perdu et bosse en vue de la reprise. Et pour cause: le 6 février, Saint-Gall accueille
Sion en championnat.
Le Temps: Peut-on parler de «nouvelle vie» pour vous?
Germano Vailati: Ce n’est pas une nouvelle vie. C’est plutôt que je retrouve mon ancienne vie, celle que j’aimais. Une vie où tu as
la motivation, de vrais entraînements, la volonté d’améliorer tous les détails. Ces six derniers mois, à Sion, c’était la nuit
complète. Je n’avais plus de motivation, pas de but professionnel, rien.
– Comment les choses se sont-elles dénouées?
– Pour partir, je devais d’abord trouver un club, puis m’arranger avec Sion, qui demandait des sommes à faire rire les gens. Quand
Saint-Gall a trouvé un accord, je n’ai pas hésité.
– Que retenez-vous de vos six mois au FC Metz?
– Le fait de jouer à l’étranger, c’est déjà quelque chose. Quand un gardien suisse arrive en France, les gens disent: «C’est quoi, ça?
» Le FC Metz a un plus gros budget que Bâle, plus de 90 employés, des entraîneurs professionnels pour les gamins de 6 ans…
C’est un autre monde. J’étais sur une bonne lancée là-bas, je me suis fait une place, mais tout a été coupé parce que j’avais un
contrat jusqu’en juin 2010 avec Sion. En France, il y a des règles; en Suisse, on donne trop de pouvoir aux présidents. Tu n’es pas
respecté, ni comme joueur ni comme homme. Tu es traité comme un objet. J’avais donné mon sang pour le FC Sion, ça a fait mal.
Mais bon, c’est du passé.
– Avez-vous l’impression que les gens vous ont oublié en Suisse?
– Ce n’est pas ça qui m’intéresse. Ce qui compte, c’est le travail que j’effectue chaque jour, pas le fait d’être reconnu dans la rue
ou pas. Mon nom commençait à circuler en France, mais ça n’a rien donné parce que j’avais ce contrat à Sion. Pendant deux mois,
j’ai fait du fitness tout seul. Après, c’était du n’importe quoi. On me demandait de faire des séances de 10 ou 20 minutes par-ci
par-là. Avec les trois autres joueurs écartés du groupe [le Polonais Zbigniew Zaki, le Français Julien Brellier et le Béninois Jocelyn
Aoueyah], on nous mettait des entraînements le samedi à 15h15, pour nous faire jongler à quatre dans un coin. C’était pire que
du mobbing.
– N’y avait-il pas moyen de mettre un terme à cette situation?
– Au pire, je savais que je serais libre en juin 2010. J’ai préféré serrer les dents plutôt que de prendre des avocats, avoir deux ans
de procédure, avec 5000 recours. Mon métier, c’est de jouer au foot, pas d’aller au tribunal. Maintenant c’est passé, je veux
penser à l’avenir. «Weg» avec tout ça, comme ils disent ici. Je suis tellement positif en ce moment…
– Avant d’évoquer l’avenir, une dernière question sur le passé. En 2006, vous aviez été élu meilleur gardien de Suisse. Quand vous
vous retournez sur votre parcours, à bientôt 30 ans, éprouvez-vous des regrets?
– Je n’ai pas de regrets parce que je sais que j’ai toujours tout donné. Le seul regret, c’est d’avoir croisé le deuxième Christian
Constantin, celui qui m’a coupé les jambes. J’ai fait trois ans sérieux à Sion, à un bon niveau. Ce n’est pas un corner qui m’a
coupé la tête, j’étais de toute façon dans son collimateur. Quand tu changes 25 fois d’entraîneur en quatre ans, au bout d’un
moment, il faut bien choisir d’autres cibles.
– On a coutume de dire que ce genre de choses rend plus fort. Est-ce le cas?
– Ce que j’ai vécu ces six derniers mois, soit ça me tuait, soit ça me rendait plus fort. Même si j’étais complètement en dehors de
l’équipe, il y a eu un déclic. Je me suis dit que je ne voulais pas mourir à Sion. Alors j’ai continué à travailler de mon côté, parfois
avec Marco Pascolo [entraîneur des gardiens au FC Sion]. Quand j’entends des joueurs se plaindre que l’entraînement est trop dur,
que le terrain est trop dur… Les difficultés, maintenant, je les avale comme des cacahuètes. J’ai appris à savourer à nouveau mon
métier.
– Un drôle de métier, non?
– Footballeur, c’est un métier comme les autres, avec ses hauts et ses bas. Mais on a de la chance. On a des responsabilités, c’est
sûr, mais rien de vital. Il faut être performant, faire des sacrifices et, même quand tu fais tout bien, il n’y a pas de garantie. C’est
un métier où tout est amplifié parce qu’on y met le cœur et la tête. Quand tu es mauvais, tu te fais tailler dans la presse et quand
tu es bon, tu es tout en haut. J’ai appris qu’il fallait avoir sa ligne et la garder, croire en soi-même et ne jamais s’enflammer.
– On imagine que vous avez encore quelques rêves en tête, non?
– Pour l’instant, je me concentre sur les entraînements. Mon dernier match officiel, c’était fin mai à Metz. Alors je mets «Vollgas»,
je me prépare à fond et j’espère être performant. Il faut dégager de la sérénité sur le terrain, être bon dans la durée, et après le
reste suit. Mon premier but, c’est de gagner ma place ici. Je n’ai pas de garantie. Les garanties, c’est à moi de les donner. Il y a un
gardien qui joue depuis un an, qui a l’avantage de bien connaître la maison. Mais je suis très décidé, je pense que Saint-Gall ne
m’a pas fait venir pour rien.
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– Après Metz, Saint-Gall… N’espériez-vous pas des clubs plus glamour?
– Je répète que j’ai de la chance de faire ce métier. On ne peut pas tous jouer à Milan… Et puis Saint-Gall, ce n’est pas n’importe
où! Il y a l’un des plus beaux stades de Suisse, une ambiance incroyable, des ambitions. Au classement, on est pas mal, à six
points du troisième [Lucerne]. Et il y a cette demi-finale de Coupe [le 5 avril contre Lausanne], un petit plus à ne pas négliger. Ici,
il y a une organisation très pro, tout est en place, tu sens que tout le monde est fier d’appartenir au club. Les gens se comportent
comme des messieurs. Le président, il vient te voir une fois à la reprise de l’entraînement pour te dire bonjour, et il reviendra au
mois de mai pour nous souhaiter de bonnes vacances.
– Que vous inspire la date du 6 février?
– Je l’ai en tête parce qu’il y a trois points à prendre. J’ai été emprisonné par un contrat mais, maintenant, je n’ai plus rien à voir
avec Sion. Je garde un super-souvenir du public valaisan, je n’ai pas eu de problème avec le FC Sion, mais avec l’Olympique des
Alpes. (Sourire). Ce sera un peu bizarre mais, une fois sur le terrain, il faudra gagner, c’est tout.