Interview d'Olivier Monterrubio
Posté : 12.04.2009 11:06
Olivier Monterrubio: «Je suis le Nadal du FC Sion!»
Nicolas Jacquier - le 11 avril 2009, 21h08
Le Matin Dimanche
Mardi 7 avril, 14h20. Alors qu'il avait toujours refusé de s'exprimer jusque-là, Olivier Monterrubio accepte de se livrer. Arrivé en avance à notre rendez-vous, fixé à la Porte d'Octodure, le Français de Tourbillon ne se défile pas, bien au contraire. Celui qui fut le partenaire privilégié d'Alex Frei à Rennes - les deux hommes composaient alors une paire gagnante - sait qu'il ne tient pas la forme de sa vie et choisit de s'en expliquer. A ce moment-là, MM. Barberis et Zermatten sont toujours en poste. Tombant le masque, le capitaine du FC Sion en profite pour asséner quelques vérités bien senties, n'hésitant pas, au passage, à égratigner son président.
Olivier, le Valais, c'est quoi pour vous?
Une région splendide où je travaille. Ma famille s'y plaît énormément. Toutes ces montagnes environnantes, ce n'est bien sûr pas ce que l'on a connu jusqu'ici. Mes enfants ont d'ailleurs pu apprendre à skier cet hiver.
Si vous n'aviez pas été footballeur...
Vous m'auriez quand même retrouvé dans le sport, sans doute le tennis ou la F1... Pour mes 30 ans, mon épouse m'a conduit au circuit de Magnicourt, où j'ai pu piloter une Arrows, le bolide de Damon Hill. Je possède aussi à la maison le casque d'Alonso, son vrai casque. J'ai longtemps cumulé en parallèle foot et tennis. Mais, à 14 ans, j'ai dû choisir, ce qui ne m'empêche pas de toujours pratiquer le tennis.
Vous êtes un peu le Federer du FC Sion?
Euh... non, je suis plutôt le Nadal! (Rires.)
Lorsque vous étiez jeune, quand avez-vous pris conscience de votre talent, qui vous rendait plus fort, différent des autres balle au pied?
Je jouais à Rodez lorsque des émissaires du FC Nantes m'ont repéré. C'était ma voie, je l'ai suivie. A un jeune qui me demanderait aujourd'hui un conseil, je me contenterais de lui dire: «Si c'est ton rêve, va jusqu'au bout, vis-le à fond.»
Durant votre carrière, avez-vous déjà soulevé des Coupes?
J'ai gagné deux ans de suite la Coupe de France avec Nantes, avant de perdre en 2008 avec Lens celle de la Ligue contre le PSG à la dernière minute. La Coupe, c'est autre chose qu'un titre de champion qui s'inscrit dans la durée. Les émotions y sont plus fortes, presque sauvages.
En Valais, la Coupe, on a déjà dû vous le dire, c'est sacré pour les supporters du FC Sion. Et pour ses joueurs?
Egalement. Avant notre match à Saint-Gall, on nous a montré un DVD recensant les 10 finales remportées par Sion. On a alors compris ce qui pouvait unir tout un canton à cette compétition. J'en avais personnellement des frissons.
Lorsque ça ne rigole pas sur le terrain, ce qui est souvent le cas cette saison, vous-même, vous vous dites quoi?
Plein de trucs et de questions défilent dans ma tête, c'est normal. Je me demande si j'ai bien fait de venir ici. Franchement, je m'attendais à autre chose en signant à Sion. Cela ne signifie pas que j'éprouve des regrets pour autant. Les supporters et les gens sont adorables. On s'est du reste fait des amis suisses en dehors du football.
Aviez-vous déjà rencontré un président aussi impliqué que l'est Christian Constantin?
Alors ça non, jamais! J'ai connu à Lens Gervais Martel, un grand président, qui respectait les gens. C'est le jour et la nuit. Ce n'est pas en enfonçant la tête des gens sous l'eau qu'on leur permet d'apprendre à nager et de mieux respirer. M. Martel nous passait aussi des savons, mais lui le faisait avec élégance.
N'est-ce pas la passion bouillonnante en lui qui pousse votre président à se conduire ainsi? Après tout, c'est quand même le boss, non?
Il est certes passionné, mais, moi, je marche à l'affectif. Et comme les limites ont parfois été franchies...
Avec le recul, comment qualifieriez-vous votre association avec Alex Frei à Rennes, vous le passeur et lui le finisseur?
Elle était à la fois magnifique et plutôt rare en termes de compréhension mutuelle. Je savais où il allait se placer, lui savait comment j'allais le servir. Si le centre était bon, c'était bingo assuré à pratiquement chaque coup.
Aujourd'hui, que reste-t-il de cette belle entente?
Une vraie amitié. Avec Alex, on s'appelle très souvent. Tenez, l'autre jour, après Suisse - Moldavie à Genève, on s'est même retrouvé à l'hôtel des Suisses. Alex est un type en or. Dortmund, c'est bien, mais il mériterait un plus grand club encore, à la dimension de son talent.
Votre corps arbore plusieurs tatouages. Quelle est la signification de chacun d'entre eux?
(Il commence à énumérer.) Sur un bras, j'ai inscrit le nom de ma fille. Sur l'autre, celui de mon fils. Je me suis aussi fait tatouer mon numéro fétiche, le 18. Lorsque je suis arrivé à Nantes, j'aurais aimé prendre le No 8. Comme il était déjà occupé, j'ai ajouté un 1 devant. Dans le dos, j'ai aussi mon signe astrologique (Lion).
En tant que capitaine, quel message aimeriez-vous transmettre aujourd'hui auprès des supporters valaisans?
Même si c'est difficile, croyez en nous.
En fin de compte, que manque-t-il au groupe pour jouer en véritable équipe?
Des points et surtout de la confiance pour tenter des choses. A force de s'entendre répéter chaque semaine qu'on est des nuls, on en vient à jouer comme des nuls! Y en a marre de se faire traiter de chèvres... Au lieu d'oser, tout le monde a la pétoche.
Dans ces conditions, éprouvez-vous encore du plaisir sur la pelouse?
Pas assez souvent. Heureusement que le groupe vit bien ensemble au quotidien. S'il devait encore y avoir des clans ou des intrigues, on aurait facilement 10 points de moins.
Sion s'apprête à disputer un match capital contre Lucerne. Comment l'emporter demain soir?
On a souvent mieux joué à l'extérieur. Alors que notre saison est décevante jusque-là, elle peut devenir magique sur deux matches. La fin de saison sera belle si on l'emporte demain soir, elle sera triste si l'on ne se qualifie pas.
Va-t-on voir un jour, au bord des terrains, un Olivier Monterrubio entraîneur?
Entraîneur? Jamais! C'est pire que joueur... Lorsque je raccrocherai mes crampons, je poserai mes valises à Nantes, dans la maison que je possède déjà. Je veux voir grandir mes enfants et vivre au côté de ma femme. Les mises au vert, les retraites, les week-ends sacrifiés, cela fait vingt ans que je fais ça... Les chambres d'hôtel, ce sera en famille pour les vacances!
CARTE DE VISITE
NOM: Olivier Monterrubio.
NAISSANCE: Le 8 août 1976 à Gaillac (Tarn).
TAILLE: 1,71 m pour 70 kg.
ÉTAT CIVIL: Marié, deux enfants, Paloma (9 ans) et Paolo (5 ans).
A joué successivement à Nantes (1996-2001), Stade Rennais (2001-2006), Lens (2007-2008). A disputé 315 matches de L1 (66 buts). Au FC Sion depuis le 12 juillet 2008 (7 buts).
PALMARÈS: Deux Coupes de France (1999 et 2000). Meilleur passeur du championnat de France durant trois saisons consécutives (de 2003 à 2006).
«On repart chaque fois de zéro»
Samedi 11 avril, 10h55, toujours à Martigny. Olivier Monterrubio arrive à l'entraînement, avant le départ pour Lucerne. Quatre jours après notre entretien, les choses ne sont plus tout à fait pareilles. La veille, Barberis et Zermatten ont été renvoyés. Comment le Français a-t-il vécu ce nouveau remue-ménage? Voici ce qu'il nous a répondu hier matin: «D'un côté, je suis surpris que l'on change, alors même qu'il ne reste que neuf matches de championnat. De l'autre, je ne suis guère étonné connaissant le président... Je ne crois pas aux vertus du choc psychologique. On repart chaque fois de zéro. On ferait mieux de faire confiance aux joueurs et aux techniciens en leur laissant du temps. Comment se fait-il que Stielike, engagé pour trois ans à Sion, doive déjà quitter le club après seulement quelques mois? Où est la continuité?»
Nicolas Jacquier - le 11 avril 2009, 21h08
Le Matin Dimanche
Mardi 7 avril, 14h20. Alors qu'il avait toujours refusé de s'exprimer jusque-là, Olivier Monterrubio accepte de se livrer. Arrivé en avance à notre rendez-vous, fixé à la Porte d'Octodure, le Français de Tourbillon ne se défile pas, bien au contraire. Celui qui fut le partenaire privilégié d'Alex Frei à Rennes - les deux hommes composaient alors une paire gagnante - sait qu'il ne tient pas la forme de sa vie et choisit de s'en expliquer. A ce moment-là, MM. Barberis et Zermatten sont toujours en poste. Tombant le masque, le capitaine du FC Sion en profite pour asséner quelques vérités bien senties, n'hésitant pas, au passage, à égratigner son président.
Olivier, le Valais, c'est quoi pour vous?
Une région splendide où je travaille. Ma famille s'y plaît énormément. Toutes ces montagnes environnantes, ce n'est bien sûr pas ce que l'on a connu jusqu'ici. Mes enfants ont d'ailleurs pu apprendre à skier cet hiver.
Si vous n'aviez pas été footballeur...
Vous m'auriez quand même retrouvé dans le sport, sans doute le tennis ou la F1... Pour mes 30 ans, mon épouse m'a conduit au circuit de Magnicourt, où j'ai pu piloter une Arrows, le bolide de Damon Hill. Je possède aussi à la maison le casque d'Alonso, son vrai casque. J'ai longtemps cumulé en parallèle foot et tennis. Mais, à 14 ans, j'ai dû choisir, ce qui ne m'empêche pas de toujours pratiquer le tennis.
Vous êtes un peu le Federer du FC Sion?
Euh... non, je suis plutôt le Nadal! (Rires.)
Lorsque vous étiez jeune, quand avez-vous pris conscience de votre talent, qui vous rendait plus fort, différent des autres balle au pied?
Je jouais à Rodez lorsque des émissaires du FC Nantes m'ont repéré. C'était ma voie, je l'ai suivie. A un jeune qui me demanderait aujourd'hui un conseil, je me contenterais de lui dire: «Si c'est ton rêve, va jusqu'au bout, vis-le à fond.»
Durant votre carrière, avez-vous déjà soulevé des Coupes?
J'ai gagné deux ans de suite la Coupe de France avec Nantes, avant de perdre en 2008 avec Lens celle de la Ligue contre le PSG à la dernière minute. La Coupe, c'est autre chose qu'un titre de champion qui s'inscrit dans la durée. Les émotions y sont plus fortes, presque sauvages.
En Valais, la Coupe, on a déjà dû vous le dire, c'est sacré pour les supporters du FC Sion. Et pour ses joueurs?
Egalement. Avant notre match à Saint-Gall, on nous a montré un DVD recensant les 10 finales remportées par Sion. On a alors compris ce qui pouvait unir tout un canton à cette compétition. J'en avais personnellement des frissons.
Lorsque ça ne rigole pas sur le terrain, ce qui est souvent le cas cette saison, vous-même, vous vous dites quoi?
Plein de trucs et de questions défilent dans ma tête, c'est normal. Je me demande si j'ai bien fait de venir ici. Franchement, je m'attendais à autre chose en signant à Sion. Cela ne signifie pas que j'éprouve des regrets pour autant. Les supporters et les gens sont adorables. On s'est du reste fait des amis suisses en dehors du football.
Aviez-vous déjà rencontré un président aussi impliqué que l'est Christian Constantin?
Alors ça non, jamais! J'ai connu à Lens Gervais Martel, un grand président, qui respectait les gens. C'est le jour et la nuit. Ce n'est pas en enfonçant la tête des gens sous l'eau qu'on leur permet d'apprendre à nager et de mieux respirer. M. Martel nous passait aussi des savons, mais lui le faisait avec élégance.
N'est-ce pas la passion bouillonnante en lui qui pousse votre président à se conduire ainsi? Après tout, c'est quand même le boss, non?
Il est certes passionné, mais, moi, je marche à l'affectif. Et comme les limites ont parfois été franchies...
Avec le recul, comment qualifieriez-vous votre association avec Alex Frei à Rennes, vous le passeur et lui le finisseur?
Elle était à la fois magnifique et plutôt rare en termes de compréhension mutuelle. Je savais où il allait se placer, lui savait comment j'allais le servir. Si le centre était bon, c'était bingo assuré à pratiquement chaque coup.
Aujourd'hui, que reste-t-il de cette belle entente?
Une vraie amitié. Avec Alex, on s'appelle très souvent. Tenez, l'autre jour, après Suisse - Moldavie à Genève, on s'est même retrouvé à l'hôtel des Suisses. Alex est un type en or. Dortmund, c'est bien, mais il mériterait un plus grand club encore, à la dimension de son talent.
Votre corps arbore plusieurs tatouages. Quelle est la signification de chacun d'entre eux?
(Il commence à énumérer.) Sur un bras, j'ai inscrit le nom de ma fille. Sur l'autre, celui de mon fils. Je me suis aussi fait tatouer mon numéro fétiche, le 18. Lorsque je suis arrivé à Nantes, j'aurais aimé prendre le No 8. Comme il était déjà occupé, j'ai ajouté un 1 devant. Dans le dos, j'ai aussi mon signe astrologique (Lion).
En tant que capitaine, quel message aimeriez-vous transmettre aujourd'hui auprès des supporters valaisans?
Même si c'est difficile, croyez en nous.
En fin de compte, que manque-t-il au groupe pour jouer en véritable équipe?
Des points et surtout de la confiance pour tenter des choses. A force de s'entendre répéter chaque semaine qu'on est des nuls, on en vient à jouer comme des nuls! Y en a marre de se faire traiter de chèvres... Au lieu d'oser, tout le monde a la pétoche.
Dans ces conditions, éprouvez-vous encore du plaisir sur la pelouse?
Pas assez souvent. Heureusement que le groupe vit bien ensemble au quotidien. S'il devait encore y avoir des clans ou des intrigues, on aurait facilement 10 points de moins.
Sion s'apprête à disputer un match capital contre Lucerne. Comment l'emporter demain soir?
On a souvent mieux joué à l'extérieur. Alors que notre saison est décevante jusque-là, elle peut devenir magique sur deux matches. La fin de saison sera belle si on l'emporte demain soir, elle sera triste si l'on ne se qualifie pas.
Va-t-on voir un jour, au bord des terrains, un Olivier Monterrubio entraîneur?
Entraîneur? Jamais! C'est pire que joueur... Lorsque je raccrocherai mes crampons, je poserai mes valises à Nantes, dans la maison que je possède déjà. Je veux voir grandir mes enfants et vivre au côté de ma femme. Les mises au vert, les retraites, les week-ends sacrifiés, cela fait vingt ans que je fais ça... Les chambres d'hôtel, ce sera en famille pour les vacances!
CARTE DE VISITE
NOM: Olivier Monterrubio.
NAISSANCE: Le 8 août 1976 à Gaillac (Tarn).
TAILLE: 1,71 m pour 70 kg.
ÉTAT CIVIL: Marié, deux enfants, Paloma (9 ans) et Paolo (5 ans).
A joué successivement à Nantes (1996-2001), Stade Rennais (2001-2006), Lens (2007-2008). A disputé 315 matches de L1 (66 buts). Au FC Sion depuis le 12 juillet 2008 (7 buts).
PALMARÈS: Deux Coupes de France (1999 et 2000). Meilleur passeur du championnat de France durant trois saisons consécutives (de 2003 à 2006).
«On repart chaque fois de zéro»
Samedi 11 avril, 10h55, toujours à Martigny. Olivier Monterrubio arrive à l'entraînement, avant le départ pour Lucerne. Quatre jours après notre entretien, les choses ne sont plus tout à fait pareilles. La veille, Barberis et Zermatten ont été renvoyés. Comment le Français a-t-il vécu ce nouveau remue-ménage? Voici ce qu'il nous a répondu hier matin: «D'un côté, je suis surpris que l'on change, alors même qu'il ne reste que neuf matches de championnat. De l'autre, je ne suis guère étonné connaissant le président... Je ne crois pas aux vertus du choc psychologique. On repart chaque fois de zéro. On ferait mieux de faire confiance aux joueurs et aux techniciens en leur laissant du temps. Comment se fait-il que Stielike, engagé pour trois ans à Sion, doive déjà quitter le club après seulement quelques mois? Où est la continuité?»